Tajmaat
2020
«L’organisation politique kabyle représente l’idéal de la démocratie, telle que l’ont rêvé nos utopistes.»
* Ernest Renan, écrivain, philologue, philosophe et historien français.
Tajmaât, ou l’assemblée, est le haut lieu où la démocratie participative Kabyle a le pouvoir de s’exercer. Tajmaât est une organisation sociale dans laquelle les citoyens kabyles se reconnaissent. Généralement située au centre des villages, toutes les familles y sont représentées. Le religieux ne s’immisce guère dans les affaires internes du village. Les résolutions de Tajmaat avaient évité à la Kabylie des affrontements à cause des croyances. L’expression Jmaâ Liman (au nom de toutes les croyances) en est la traduction de cette philosophie de vie, qui avait durablement consacré la séparation du religieux de la cité. Ainsi, la gestion des affaires courantes s’opérait sans recours aux textes ou représentations religieuses. Il n’y avait jamais eu de guerres interconfessionnelles en Kabylie.
L’écologie, quant à elle, avait sa part de sacralité, puisqu’à titre d’exemple, un villageois n’avait aucunement le droit d’abattre un arbre, même faisant partie de sa possession, sans l’aval explicite de membres de l’assemblée.
Tajmaât avait été aussi pour but d’exister une visée profondément humaniste. L’humain s’étant toujours trouvé au centre de ses préoccupations, le sort commun prévalait sur tout le reste. Pas de prison, et le bannissement remplace les vendettas en cours ailleurs. Tajmaât a pour fonction d’entretenir la cohésion sociale et le respect des règles démocratiques émanant de cette même assemblée.
Longtemps réservée à la seule prérogative des hommes, nous assistons ces dernières années à un changement de fond au sein de certains villages. Les femmes prennent part aux réunions à Tajmaat. Parfois, des assemblées exclusivement féminines se créent par-ci et par-là. Leur projet reste le même et se veut fidèle la doctrine ancestrale de Tajmaât : oeuvrer pour et dans l’intérêt de la collectivité.